Je regarde la neige tomber en sirotant mon café depuis 1h. Quel moment parfait n’est-ce pas? C’est si beau. Doux. Ça fait tellement du bien de profiter de la tempête, au chaud.
Parce qu’en fait, je me remets de mes émotions. Ce matin était tout un défi de réussir à déposer la Tribu à la halte-garderie. Ça fait donc 1h que je regarde ma page blanche, aussi blanche que la neige qui ensevelie Montréal. Ma tête est bombardée de toutes les tempêtes des 3 dernières années.
J’ai le sentiment agaçant d’avoir perdu toute ma capacité d’adaptation en même temps que les placentas de mes enfants. Pouf! Disparue! On n’a plus besoin de tout ça maintenant Madame. Laissez-nous en disposer.
Je repense à toutes les tentatives pour braver la neige.
La première tempête, je m’y suis jetée dedans, complètement inconsciente. Poussette double et 3 bébés. La Grande devait marcher, mais ses petites pattes n’étaient même pas assez grandes pour soulever ses pieds plus haut que le banc de neige. J’ai rapidement dû tirer la poussette [zéro fonctionnelle dans la neige] d’une main, prendre la Grande à bras-le-corps sous mon autre bras. Vous dire de quoi j’avais l’air… en détresse, voilà! Une femme d’une bonté sans nom m’a aidé à parcourir les 300m qui me séparait de la garderie.
Le regard de l’éducatrice quand elle m’a vu débarquer, mais qu’est-ce que je faisais là? J’ai réalisé ce matin-là que j’avais le droit de rester chez nous, au chaud, avec mes bébés. Une journée en garderie n’équivaut pas à un examen du barreau, tsé. Personne ne me l’avait dit.
Puis, ma belle-mère m’a équipée pour de vrai, un traineau. La révélation! Telle une véritable famille de trappeurs du grand Nord, l’hiver n’a pas su nous terrasser plus cette année-là.
La situation hivernale s’est complexifiée quand j’ai dû livrer mes 3 enfants dans 2 garderies différentes. Le niveau de déneigement variant grandement le long du trajet de 1.8km. J’ai donc essayé un petit chariot, deux ski en avant, deux roues en arrière. J’ai essayé la voiture. J’ai essayé de me rouler en boule tout l’hiver. J’ai tout essayé.
Puis, ma belle-mère divine m’a encore plus équipée. Un traineau double digne de la traversée du Nunavut. À suivi la belle époque où je pouvais entasser 3 enfants dans le même traineau, sous une montagne de sacs et boîtes à lunch. C’était épique!
J’ai inventé une chanson [parce que c’est un bouclier supra-protecteur pour la sauvegarde de la santé mentale] que je vous dévoile, libre de droit
En tirant sur la neigeuh bruneuh
En ce beauuuuu jouuuuur deeee semaineuh
À travers les zarbres pu veeeeert
C’est l’hiver! C’est l’hiver! C’est l’hiveeeeeer!
sur l’air de C’est l’hiver, paroles de mon cru
[De rien!]
Cette année encore, je dois me réinventer. Je ne suis plus capable de tirer 3 enfants, en tout cas, je pense. C’est là que le coefficient de JMeFaisChier est super important. Quel désagrément sera le moins pire. Ce matin, embourbée dans la neige et les opérations déneigement, ce qui devait me prendre 10 minutes en a pris 48.
Lundi, pour parcourir 268m, j’ai fait marcher les enfants. Je n’ai même pas assez de cheveux pour compter tous les arrêts qu’on a dû faire. Toutes les plaintes reçues. Tous les caches-nez ajustés. Tous les encouragements prodigués. Mon voisin, tel le messie descendu du ciel, a sauvé la Triade d’une épopée forcée en tirant tout ce beau monde (plus la sienne!) jusqu’à la pré-maternelle.
Le coefficient de JMeFaisChier me pousse donc à laisser la voiture dans le banc de neige et d’essayer d’aller les chercher en traineau. Après tout, dans mon ancienne vie, je planifiais mes vacances pour faire de la randonnée en pleine autonomie. Marcher 7 jours durant, avec un sac-à-dos beaucoup trop lourd, était ma définition de fun. Incroyable, mais vrai!
Vais-je réussir à tirer 45 kilos de chair fraiche? Le suspense est à son comble!
To be continued…
